lundi 27 avril 2009

FORCES OCCULTES, FORCES CULTURELLES


A 969 mètres d’altitude sur le Bonnet à l’Evêque est érigée l’une des plus merveilleuses forteresses de notre histoire: LA CITADELLE. Elle s’établit majestueusement sur une superficie de plus de 8000 mètres carrés. Selon une ordonnance parue le 9 Avril 1804 Jean Jacques Dessalines ordonna à ses généraux la construction des forts au sommet des montagnes afin de repousser toute éventuelle agression des anciens colons Français. Ainsi Henri Christophe commandant du Nord commença la construction de la CITADELLE le 15 Janvier 1805. En 1813 Le Roi Christophe inaugura cette forteresse quoiqu’inachevée. Les travaux sont suspendus depuis la mort de Christophe le 8 Octobre 1820. On l’appelle assez souvent La Citadelle Christophe, La citadelle La Ferrière et aussi La Citadelle des Trois Henri en souvenir des trois génies constructeurs de cette merveille architecturale. Il s’agit d’Henri Christophe, le concepteur, Henri Barre qui a fait le plan et Henri La Ferrière qui fut de nationalité Suisse. De la Citadelle on peut observer la baie du cap Haïtien et celle de L’Acul, on peut observer la Commune du Dondon et toute la Plaine du Nord. On ne peut apprécier la Citadelle sans visiter le Palais Sans Souci, à Milot, construit sur six carreaux de terre. Le palais est aussi majestueux et imposant que celui, portant le même nom de Fréderic II de La Prusse(Allemagne)
Ces deux monuments sont d’une poésie architecturale douée d’une imagination surhumaine qu’aucun génie n’a jamais rêvée, une symphonie inachevée qu’aucun ange n’a jamais chantée. Ils sont des éléments de notre culture, de véritable chapitre de notre patrimoine ancestral. La citadelle est l’expression de l’intelligence nègre, la raison géométrique de la résistance d’une race avilie par l’esclavage et le colonialisme, la passion de vivre libre d’un peuple créateur, symbole d’orgueil et de dignité « Sitadèl leve tèt tout nèg sou la tè beni » de l’esclavage à la liberté le nègre d’Haïti a donné une leçon de civilisation en prouvant que l’intelligence, la suprême vertu humaine, n’a pas de race.
La citadelle attire beaucoup de visiteurs haïtiens et étrangers. Mais la période la plus florissante est celle de la Pâque, spécialement le jeudi saint. Une légende veut faire croire que Le Roi avait l’habitude d’ouvrir le palais sans Souci à la population chaque jeudi saint. Après la fête, à minuit, Le Roi monte sur son cheval blanc pour aller fermer les travaux à La Citadelle, car on ne pouvait pas travailler le vendredi saint. Donc toutes activités devaient être suspendues dans tout le Royaume, du Jeudi Saint à minuit jusqu’après le dimanche de pâques. Alors chaque Jeudi saint des milliers de gens particulièrement des jeunes montent à la citadelle et visitent aussi le Palais sans souci pour reposer à l’ombre du cayimittier royal. Cet arbre vieux de plus de deux siècles servait de tribunal au Roi Christophe. Chaque jeudi le Roi s’y installe pour recevoir les doléances de la population. Aujourd’hui cet arbre est encore la, mais il semble penché sous le poids de l’âge. Un essaim d’abeilles y habite et attire la curiosité de plus d’un.
Cette année la visite à la citadelle a été choquante et la soif des visiteurs n’a pas été étanchée. Une compagnie française séjourne à la citadelle en vue de tourner un film. Les cinéastes vivent, mangent, lavent les linges, couchent et dorment à la citadelle. Ils sont accompagnés d’un ancien ministre de la culture, cinéaste aussi, Mr Raoul Peck. Ainsi la plus grande partie de la forteresse est interdite aux visiteurs, et on exige le silence le plus profond pour ne pas troubler le travail des cinéastes. Selon certaines gens de la localité un marché de la prostitution s’émerge au niveau de la citadelle. Les ministres de la culture et du Tourisme ont boudé une invitation du sénat concernant ce nouveau scandale.
C’est bien une insulte, une profanation, car les cinéastes pourraient dormir à Milot ou au Cap. Quand un haut lieu sacré d’une nation comme la Citadelle est sujet à des activités profanes, ordinaires ou ménagères il faut s’attendre aux colères des dieux. Il est temps que les haïtiens prennent eux-mêmes la gestion de leurs richesses culturelles, nous devons respecter notre héritage. Encore une fois la Constitution de 1987 est violée, blessée et transgressée en son article 215 qui stipule que «Les richesses archéologiques, historiques, culturelles et folkloriques du pays, de même que les richesses archéologiques témoins de la grandeur du patrimoine national. En conséquence les monuments, les ruines, les sites des grands faits d’armes de nos ancêtres, les centres réputés de nos croyances africaines et dont les vestiges du passé sont placés sous la protection de l’Etat »

Professeur Bell Angelot, Fondateur
Du Centre Haïtien de Recherches et d’Investigations
en Sciences Sociales